torsdag 27 oktober 2016

Le Baathisme et nous, Mauritaniens : du nationalisme arabe au nazisme tropical


Essayons de rafraîchir ou de réchauffer les faits, pour ceux qui ont encore une mémoire courte.

Au sortir de sa guerre avec l’Iran, guerre que l’incorrigible Sadolf Hitsein, ancien protégé de l’oncle Sam, a provoquée, l’Irak baathiste s’emploie à affirmer son leadership sur le monde arabe et à constituer une clientèle soit idéologique, soit militaire, en Afrique et dans le monde arabe.

Cet activisme trouve un écho d’autant plus favorable en Mauritanie qu’au début des années 1960, des jeunes Maures, en proie à une crise d’identité culturelle, avaient trouvé dans l’idéologie baassiste un début de solution à leur quête de référence. Institutionnalisé sous la forme d’une branche mauritanienne du parti Ba’th, ce courant inspirera, avec le courant rival des Nassériens dont ne le séparent que quelques points de détail, la politique de discrimination conduite envers la composante noire du pays.

S’inspirant de la stratégie qui a si bien réussi à Saddam pour la conquête du pouvoir, les baa’thistes mauritaniens mobiliseront toute leur énergie pour comploter (infiltration de larges secteurs de l’armée et de la police, par exemple). Ce goût immodéré pour le putsch leur vaudra des démêlés avec les différents régimes, ainsi que des séjours plus ou moins prolongés en prison.

C’est ainsi qu’en septembre 1988, plusieurs dignitaires du Parti baa’thiste mauritanien (Bredeileil , Memed Ould Ahmed pour ne citer que leurs figures emblématiques...) furent arrêtés et jugés pour "participation à une entreprise de nature à nuire à la défense nationale, enrôlement de soldats pour le compte d’une puissance étrangère, connaissance d’activités nuisibles à la défense nationale sans l’avoir fait savoir aux autorités".

Au cours du procès, Mohamed Yehdih Ould Breideleil, considéré comme le premier responsable de la branche locale des racistes mauritaniens, reconnut non seulement que "l’ambassade d’Irak à Dakar lui versait un salaire mensuel de 110 000 UM/10 000 FF à l’époque pour qu’il assure la direction du mouvement en Mauritanie", mais aussi " qu’elle coordonnait la structure militaire baa’thiste créée en 1980 et placée sous le commandement du capitaine Mokhtar Ould Saleck". Cette "collaboration" lui vaudra la mansuétude de ses juges.

Un an après avoir purgé sa peine, il opérera un retour remarqué dans l’instance dirigeante du pays : il sera en effet nommé secrétaire général du CMSN, un poste spécialement créé pour lui. A l’époque, le régime de Sadolf Hitsein s’abstiendra d’intervenir, du moins ouvertement, en faveur de ses protégés, préférant donner la priorité à ses relations avec Taya et son gouvernement, qu’il assistait économiquement et dont il ne pouvait qu’approuver la politique d’arabisation.

L’idéologie baa’thiste, tout en ayant ses fidéles zélateurs en Mauritanie, est surtout utilisée comme une ressource politique dans les inévitables et secondaires conflits d’intérêt qui opposent les différents lobbies beydanes. Jusqu’ici cependant, la présence irakienne, tout en allant crescendo au fur et à mesure que s’exacerbaient les tensions raciales (les deux s’alimentant réciproquement), restait dans les limites "raisonnables". C’est le conflit avec le Sénégal en 1989 et la radicalisation par le régime de sa politique raciste qui conféreront à l’engagement irakien une ampleur telle que les chancelleries accréditées sur place, d’ordinaire plus circonspectes, feront part de leurs inquiétudes. Pour bien situer les choses, un bref rappel de la stratégie suivie par le gouvernement mauritanien dans son conflit avec le Sénégal s’impose.

Dès le déclenchement des événements d’avril-mai 89, le régime du colonel Taya s’employa à les présenter comme l’illustration d’une opposition entre monde arabe et monde noir. En clair, il se présenta comme le défenseur zélé de l’arabisme contre les noirs réticents, voire anti-arabes (les Flam-) aiguillonés par le Sénégal, symbole d’une "francophonie honnie" et de la négritude.

Il ne put cependant, malgré cette présentation manichéenne, capitaliser un quelconque soutien auprès des pays arabes, préoccupés par la préservation de leur influence en Afrique noire, dont la tête de pont est justement le Sénégal. Les monarchies du Golfe se cantonnèrent dans une prudence réserve. Les partenaires de l’UMA ne furent guère plus enthousiastes. Le Maroc de Hassan II, en représentant les intérêts du Sénégal à Nouakchott, montra où penchaient ses sentiments - un officiel marocain déclara que "la Mauritanie (était) un pays voisin, alors que le Sénégal (était) un pays ami" ; l’Algérie prêcha la modération et démentit avec véhémence avoir livré des armes à la Mauritanie, comme l’en accusait l’hebdomdaire SOPI de Wade.

Seul l’Irak s’empressa de venir au secours du régime satanique de Taya, d’autant que les baa’thistes locaux avaient désigné le colonel Taya comme le leader du nationalisme arabe en Mauritanie après les déportations et les massacres des négro-africains.

Les relations entre les deux pays ne cesseront dès lors de s’intensifier : livraison d’armes dont une trentaine de chars T55 réceptionnés à Nouakchott début juillet 1990, émissaires hebdomadaires entre les deux capitales ; signe de l’étroitesse de ces contacts politiques, les rares visites à l’étranger du colonel Taya le conduisent à Bagdad ; formation de la Garde présidentielle appelée BASEP (Bataillon de la sécurité présidentielle) et composé exclusivement de Maures d’Atar, en Irak, constitution d’un Comité national de soutien à l’Irak.

On se souvient encore des multiples manifestations de soutien à l’Irak encouragées en sous-main par les autorités, la police d’Ely Ould Mohamed Vall n’ayant mis aucun zèle à les disperser. Quelle aurait été son attitude si des négro-Africains s’étaient hasardés à exprimer leur opinion dans la rue ? Plus significativement, l’ambassadeur d’Irak à Nouakchott prit la tête de quelques cortèges et ouvrit dans ses locaux un bureau chargé du recrutement des volontaires. Ce diplomate, qui se comportait en véritable proconsul, n’avait évidemment pas été rappelé au respect des règles qui régissent sa fonction. Une chose au moins était rassurante : malgré leur zèle, très peu de manifestants se portèrent volontaires pour combattre, preuve que les comportements suicidaires n’ont pas totalement gagné les esprits.

De nombreux appareils et navires irakiens ont trouvé refuge en Mauritanie, ainsi l’avion de M. Dumas, en visite à Nouakchott, s’est-il glissé entre deux boeings des Iraqi Airways. De plus, la Mauritanie de Taya aurait offert "hospitalité" à la famille de Saddam, cependant que celui-ci y transférait de colossales sommes d’argent.

Mentionnons enfin un certain nombre d’initiatives entreprises soit par les autorités déconcentrées (ainsi le gouverneur d’Aleg a-t-il lancé une campagne de production agricole en "solidarité avec le peuple irakien") ; soit par les principaux responsables de l’Etat : on pense à la démarche entreprise avec les autres pays de l’UMA auprès du Conseil de sécurité et tendant à l’arrêt des combats, alors que Saddam ne manifestait aucune disposition à se conformer aux résolutions des Nations unies. La crise du Golfe aura agi comme un révélateur de l’ampleur de la présence irakienne en Mauritanie et de l’inféodation du régime de Taya à celui de Saddam Husseïn.

Mais la manifestation la plus éclatante de l’amitié mauritano-irakienne, ou entre Saddam et Taya, sera fournie par l’affaire dite des missiles. De quoi s’agit-il ? Au mois de mai 1990, le porte-parole du Département américain, Margaret Tutwiller, révèle la construction par l’Irak d’une base de lancement de missile 6 dans le Nord désertique de la Mauritanie. L’information paraît d’autant plus plausible que les Américains disposent de satellites d’observation très performants et que le régime de Sadolf Hitseïn n’a jamais fait mystère de sa volonté de se doter d’armes balistiques. Naturellement, comme toujours, la Mauritanie dément.

Le ministre des Affaires étrangéres de l’époque, l’étrange Hasni Ould Didi, qualifie ces informations de "mensongères", estimant qu’elles font partie d’une campagne anti-irakienne lancée déjà avant l’invasion du Koweït. S’il est difficile de se prononcer sur l’état des travaux entrepris, une chose en revanche paraît certaine : le projet de tester les missiles en Mauritanie a bel et bien existé, il aurait même connu un début d’exécution.

C’est seulement après les révélations du Département d’Etat, surprises par l’ampleur que prenait l’opération et les craintes qu’elle suscitait (les ambassades maghrébines à Nouakchott ne furent pas les dernières à exprimer leur désapprobation), que les autorités mauritaniennes y renonceront, la mort dans l’âme.

Ces développements éclairent un peu mieux le fondement de l’engagement mauritanien auprès de l’Irak pendant la "mère des défaites"....Euh, pardon, la "mère des batailles", comme l’appelait Saddam. Il s’agissait pour le régime de Taya de se donner les moyens de poursuivre sa politique de discrimination raciale et d’extermination ethnique à l’intérieur, l’assistance irakienne ou de Saddam dans les renseignements et les services de sécurité (ce n’est pas Ely ould Mohamed Vall qui va nous démentir) garantit au pouvoir de Taya une certaine stabilité en dissuadant les lobbies maures concurrents d’entreprendre un coup de force ; à l’extérieur, les livraisons d’armes irakiennes permirent d’alimenter sa rhétorique guerrière et belliciste. Plus fondamentalement, en "opérant", dans la crise du Golfe, un arbitrage en faveur de l’Irak, le colonel Taya a considérablement fragilisé son régime.

Le coût économique de son alliance avec Bagdad est très élevé : gel par les pays du Golfe de leur aide, conditionnalité accrue des prêts du FMI. Politiquement, l’aggravation de la crise économique aura pour effet d’obérer la capacité du régime à s’attacher une clientéle qui transcende les cercles semassides.

La démocratisation de plusieurs pays africains après Baule, dont le Mali, fidèle allié du temps de "Mouss-atrocités", ou Moussa Traoré, si vous voulez, fait ressortir davantage la nature anachronique du pouvoir du petit protégé de Saddam. Au total, l’alliance avec Bagdad et la "mère des déroutes" auront accéléré la crise d’un régime que sa folie raciste condamnait de toute façon à plus ou moins long terme.

Prenant acte de la nouvelle donne (déroute de Saddam, libéralisation politique en Afrique, montée du mécontentement interne), le colonel Taya réfreine ses ardeurs pro-saddamistes et engage un simulacre de démocratisation qui le remettrait dans l’air du temps. Mais chassez le naturel, il revient au galop ; dictateur devant l’éternel, Taya ne pouvait changer. Il met le système dans l’impasse.

Août 2005 : Ely son bras droit, notre Barzan Ibrahim Tikriti local entendez l’alter ego de l’ancien chef des services de renseignements irakiens (lui aussi condamné à mort) ne pouvait rester impassible ce n’était plus Taya qui était menacé mais tout le système et ses hommes. Ely n’avait pas le choix, il fallait "dégripper la machine" (selon ses propres mots), et c’est ce qui explique l’acte I du putsch du 3 août 2005, tout le reste n’est que du théâtre. Ely et Aziz, Deddahi, et les autres du système n’étaient et ne sont venus que pour sauver leurs intérêtes immédiats, tout le reste n’est que du "khourouj", comme on dit chez nous.

Une pensée pieuse à nos déportés et à toutes les victimes du couple Taya-Saddam.

La lutte continue !

Inga kommentarer:

Skicka en kommentar

NOTRE COMBAT

Notre combat est des plus hardis mais aussi des plus exaltants. Nous le continuerons en restant unis dans la détermination et dans la fidéli...