Nous avons écrit une thèse en Anthropologie et sociologie du politique à
l’Université Paris 8, en France, avec comme sujet : « Elhadj Mahmoudou Bâ, créateur et modernisateur des écoles
Al-Falah en Afrique de l’Ouest et centrale ».
Le 02 Février 2016, à l’initiative de l’Association « La main dans
la main », nous avons tenu une conférence publique dans les locaux de
l’Ancienne Maison des Jeunes à Nouakchott, en présence de nombreux compatriotes
de toutes ethnies confondues, pour parler d’Elhadj Mahmoudou Bâ, un des plus
grands savants en sciences islamiques du XXe siècle, dont l’œuvre a
révolutionné la société africaine, dans sa partie ouest et centrale, notamment,
dans bien des domaines, dans celui de l’enseignement et de la culture, plus
particulièrement.
Le combat qu’il a mené sa vie durant était dirigé contre l’ignorance,
l’analphabétisme, l’esclavage, la stratification sociale, les innovations
blâmables(Bida), l’exploitation de l’homme par l’homme de quelle que manière
qu’elle soit, où qu’elle soit et d’où est ce qu’elle vienne, la violation des
droits humains, et bien sûr, la colonisation sous toutes ses formes, qui est
d’ailleurs, incontestablement, la première responsable de l’arriération des
pays dits en voie du développement. D’où on peut comprendre aisément, des
obstacles qu’il a dû surmonter et des adversaires qu’il a affrontés, dont on
parlera l’extraordinaire hostilité persistante, pour réussir sa mission à
caractère universellement humanitaire.
Ainsi, il luttait pour la liberté, l’égalité, la justice et la
démocratie, des ingrédients qui composent l’islam originel, le but final visé
par sa lutte étant de former de bons
citoyens qui soient de bons musulmans, puisque toute société composée de ceux
-ci, est une société de paix, juste, égalitaire et démocratique, et
inévitablement, développée, au sens propre et premier du terme.
Nous avons jugé impératif de
sortir cet érudit de renommée internationale, dont l’apport au rayonnement
culturel, au rapprochement des peuples, et à la civilisation universelle étant
empiriquement attesté par l’UNESCO, de l’oubli, mais aussi de l’ignorance de la
tranche d’âge des 40 ans, puisqu’il est mort en Janvier 1978, après avoir
laissé ses empreintes ineffaçables à travers le monde entier, surtout en
Afrique de l’Ouest et centrale, la sphère principale de sa mission
socioculturelle.
Nous avons donc estimé que ce
grand réformateur moderne, qui a rendu un service précieux et inestimable, non
pas seulement à la nation mauritanienne mais à une grande partie de l’Humanité,
ne mérite pas ce silence ingrat des
historiens et islamologues de tous bords, silence que nous avons tenté de
rompre par l’écriture de cette thèse, et à l’avenir, par la tenue des
conférences publiques, semblables à celle du 02 Février dernier, et
éventuellement par d’autres voies susceptibles de diffuser largement des
connaissances relatives à sa vie hors du commun et son œuvre extraordinaire dont
les enseignements véhiculent un message on ne peut plus actuel aujourd’hui.
Comment Elhadj Mahmoudou Bâ est
venu s’installer à Nouakchott ? En répondant à cette question, nous
n’aurons parlé que de la dernière partie de son combat, le un tiers de sa vie
active, en faveur de l’Humanité dont fait partie son peuple, son pays, la
Mauritanie qu’il aime plus que tout, après Djeol, son village natal, où, au
terme de ses études supérieures au Moyen Orient, en Arabie Saoudite et en
Egypte, notamment, il créa Al-Falah,
son école qui va être le cadre de sa mission socioculturelle, et la mère des
centaines de Medersas qu’il créera ensuite,
à travers le continent africain noir qui avait le plus besoin de
lui ; le monde Arabe, pourtant, dont la plupart des dirigeants sinon
quasiment, à l’époque, étaient ses
collègues dans les Universités Moyen-Orientales, et qui le connaissaient et
appréciaient à juste titre, mieux que ses compatriotes, les Africains, hormis
ceux du Maghreb et de l’Egypte.
En effet, c’est au
Cameroun en 1962, que Maitre Mokhtar Ould Daddah, le premier président de la
République Islamique de Mauritanie, est allé chercher et supplier Elhadj
Mahmoudou Bâ de rentrer en Mauritanie afin de moderniser l’enseignement en
langue arabe, après avoir sur le terrain, lors de sa mission étatique dans ce
pays à multi ethnies, dont un peul, en l’occurrence, Ahmed Aydio était
président, constaté que le Cameroun,
paradoxalement, était plus avancé que la Mauritanie en matière de modernité au
plan enseignement arabe, l’exploit étant attribué à Elhadj Mahmoudou qui y
était en mission culturelle à la demande de son président.
Rentré en Mauritanie par sacrifice en faveur
de son peuple, Elhadj Mhmoudou Bâ fut d’abord et aussitôt nommé l’Inspecteur
général de l’Enseignement Arabe et ensuite,
conseiller culturel et Ambassadeur itinéraire auprès des pays musulmans,
d’une manière générale, le monde Arabe plus particulièrement. On découvrira le
rôle déterminant qu’il a joué dans l’exercice de ces fonctions, dans
l’alignement de la Mauritanie dans les rangs des pays évolués, modernes,
démocratiques, au sein de l’ONU.
Avant cette
date(1962), Elhadj Mahmoudou Bâ avait déjà implanté ses écoles, par dizaine, en
Mauritanie, au Sénégal, au Mali, au Cameroun, en Guinée, en Côte d’Ivoire, au
Ghana, au Nigéria, au TCHAD, dans les deux Congo, au Libéria, en Siéra-Léone,
en Gambie, bref, dans toute l’Afrique de l’Ouest et centrale, sans oublier le
Gabon où, après la conversion du président Bongo à l’islam en 1974, une mission
culturelle s’est rendue dans ce pays, à la demande expresse du président Bongo
auprès de l’Etat mauritanien.
Celui-ci, volontiers, répondit favorablement
en chargeant Elhadj Mahmoudou Bâ l’exécution officielle de ce contrat cultuel
qui permettra au Gabon, dans l’espace de 20 ans de passer de zéro % de
musulmans à 12%, sans parler d’un nombre impressionnant d’écoles
corano-islamiques modernes et des Mosquées partout, dans villes et villages
gabonais. Ce pays aujourd’hui, à l’instar du Sénégal, du Mali, du Cameron, pour
ne citer que ces trois pays, ont autant, ou presque, de cadres francisant
qu’arabisants, et ce, grâce aux écoles falahi.
Donc, avant de parler, prochainement si Dieu
le veut, du rôle éminent que Mahmoudou Bâ a joué dans l’expansion et la
modernisation de de l’enseignement arabe en Mauritanie, nous reculerons d’un
demi-siècle, environ, jusqu’en 19O8, date à laquelle ce savant peul, simple
berger, non scolarisé jusqu’à seize ans,
qui impressionna le monde entier
par son histoire extraordinaire, fut né,
tout en marquant un arrêt en 1941, date de la création d’Al-Falh, dans
la perspective de réhabiliter ce marabout pas comme les autres, grâce à qui la
Mauritanie est aujourd’hui une référence en matière du bilinguisme.
Domaine par
domaine, tant au plan secteur public que privé, nous citerons des cadres,
autant arabophones que francophones, qui sont issus des écoles Al-Falah, dont
la majorité provient d’Al-Azhar, la célèbre Université du Caire, en Egypte, ou
encore des pays Arabo-islamiques, de l’Iran, du Soudan, ou de ceux du Golfe,
dont le Kuweit principalement.
SY Mamadou Samba, docteur en
Anthropologie, écrivain journaliste, ancien directeur général adjoint du Quotidien national Chaab, à l’Institut
International d’études Supérieures Appliquées de Nouakchott, Mauritanie,
coordinateur en communication et relations publiques.
Tél :
43 71 87 61 Email : Bouyeba@live.fr